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Cathiminie, d'ici d'ailleurs et d'autre part...
19 avril 2009

Cinéma

Il y avait très longtemps que je n'étais allée au cinéma. Si longtemps que je ne me souvenais plus que la distance entre les sièges étaient trop courtes pour que j'y étale mes jambes. Quelle idiote je fais de ne pas avoir regardé ce film en vidéo. mais j'avais besoin de sortir de chez moi et ce film, je voulais le voir avant même qu'il ne soit programmé sur les écrans suisses. Par chance, il était encore à l'affiche à 20 mn en voiture de chez moi. Je n'ai regretté ni le trajet ni les 15CHF dépensés, ni l'inconfort des sièges.

seraphine_home

Peu de mots au départ, une femme crevait l'écran de sa simplicité mais aussi de son émerveillement au monde. Tantôt soumise aux lois de sa patronne, au mépris de sa logeuse, du marchand de couleurs, tantôt habitée d'une lumière intérieure si intense que j'en avais les yeux qui pleuraient. Voilà pourquoi on parle d'illuminé. C'est souvent péjoratif, mais là c'était magnifique. "Bienheureux les fêlés parce qu'ils laissent passer la lumière". Oui, cette femme laisse passer la lumière de son monde intérieur, même si ce monde confronté à la rage du monde réel ne génère que souffrance, peur et folie. L'actrice Yolande Moreau a tellement bien joué cette illumination et cette vie sur le fil du rasoir entre réalité et folie!
Depuis des années, je m'intéresse à ce qui peut permettre à ces illuminés, ces fous que je côtoie dans mon travail, de tenir en vie. J'écoute leurs délires, leurs constructions, leurs bricolages de chaque heure, de chaque jour, pour se maintenir aussi éloignés que possible de la destruction intérieure qu'ils vivent au quotidien.

J'avais eu l'occasion de visiter une exposition de l'Art Brut à Paris en 1995 et j'avais été subjuguée, mais aussi  profondément émue de cet acharnement à vivre, que déployaient ou avaient déployés ces personnes folles, internées dans ce qu'on appelait à l'époque, des asiles. J'avais imaginé la force intérieure, vitale qui les poussait à peindre, sculpter, dessiner ou écrire avec des matériaux tous plus invraisemblables les uns que les autres. Visiter cette exposition ne m'avait pas laissée indifférente, et en cette dernière année d'études de psycho, j'en avais même fait un dossier, espérant pouvoir un jour initier, favoriser, soutenir  les activités créatrices des personnes dont j'aurais à m'occuper! J'en ai rencontré quelques unes, pas aussi folles, ou pas aussi reconnues que Séraphine, et j'ai toujours soutenu, favorisé, encouragé leur productions, qu'ils s'agissent d'enfants, d'adultes délirants, d'alcooliques, de toxicomanes, de mourants quasi déments même, et quelque soit le moyen choisi (peinture, modelage, sculpture, musique, écriture, chant...)
Et là en visionnant ce film, j'étais de nouveau subjuguer par la ténacité folle de Séraphine à accomplir son oeuvre, envers et contre tous, sauf ce collectionneur qui l'a soutenu et qui en lui possédait une fêlure qui peut être l'a porté à ne pas reléguer Séraphine au rang de tâcheron des autres. Même si parfois on peut se demander s'il ne profite pas un peu de "son" artiste pour son bien propre. En attendant, il a su percevoir le talent de cette artiste, sans forcément mesurer la nécessité vitale pour elle de peindre jusqu'à l'épuisement, dans une sorte de rituel exorcisant sa folie!
Et ses peintures sont magnifiques! J'ai habité 20 ans en Picardie, dont Senlis dépend et je n'avais jamais entendu parlé de Séraphine, ni de ses oeuvres. Mais au regard de ce qui a initié leur création, à l'occasion j'irai les admirer! Mais à la limite peu importe qu'elles soient connues dans le monde de l'art, si ce n'est à faire connaitre la folie autrement que par le biais répressif des politiques psychiatriques actuelles!
La folie, la misère et la mort ont rattrapé Séraphine plus tôt qu'elle ou son mécène ne l'aurait souhaité, mais elle aura transmis au monde, et en tout cas à moi qui n'ai plus besoin d'être convaincue, que la folie peut être destructrice, mais que partout où il reste une part de sujet, il y a quelque chose de beau, d'humain et de profondément vivant! Et que chaque thérapeute, qui est censé soigné, doit porter et favoriser et soutenir cette suppléance du sujet qui lutte contre les démons qui l'habite! Et pourquoi pas par l'art!

Bravo à ce film. à ces acteurs, dont Yolande Moreau qui a su si bien rendre l'illumination mais aussi la souffrance de Séraphine. C'est une actrice extraordinaire, et j'ai souvent eu le sentiment que Séraphine et elle était une seule et même personne, peut être parce qu'elle savait jouer à la perfection ce regard que j'ai si souvent perçu chez ceux que l'ont dit fous.

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Commentaires
M
Pas été voir ce film, trop de récompenses, c'est certainement un tort de ma part !!!!
B
très beau ce que tu nous dit là, j'avais aussi visité cette expo d'art brut et elle m'avait aussi impressionnée....<br /> <br /> je n'ai pas vu ce film, moi non plus je ne vais plus au ciné, avec pourtant un grand complexe MK2 à 5mms de chez moi, au bord du canal, j'y suis mal à l'aise et je préfère un vidéo, peinarde chez nous, la queue pour entrer, les prix des places....les odeurs...ça me bouffe mon plaisir!!!<br /> <br /> les fous ne sont pas ceux que l'on croit! suffit de lire le journal!!et ils ne font pas d'oeuvre d'art.....<br /> <br /> bonne fin de journée!
Cathiminie, d'ici d'ailleurs et d'autre part...
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